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L’hypersexualisation sociale (2/2)

publié le 17 Août 2015

écrit par assocultureegalite
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Article publié par France-Antilles le 17 août 2015.

Les conséquences sont graves dans tous les domaines :

La santé

Sous les apparences de la modernité, de l’audace, ces images à caractère sexuel imposent des stéréotypes éculés. Dans les films pornographiques, les femmes sont très souvent montrées comme soumises, asservies, les filles apprennent, de plus en plus tôt, la nécessité de plaire, donc l’importance de l’apparence, avec toutes les dérives qui en découlent : troubles de l’alimentation – anorexie, boulimie – obésité infantile, image corporelle négative, piètre estime de soi…

Développement psychologique

D’abord celui des petites filles à qui on impose des préoccupations qui ne sont pas de leur âge (on a parlé de «vol d’enfance » ) et qu’on met en danger par des tenues qui risquent d’envoyer des signaux trompeurs à leur entourage masculin. Mais aussi celui des garçons : ils doivent s’imposer comme « mâle dominant » et se conformer à une image de durs, de séducteurs en réprimant leur propre sensibilité. Tout cela tend à banaliser les rapports dominé-dominant dans la relation amoureuse. La dimension socio affective est mise au second plan car les garçons recherchent davantage la performance sexuelle et la consommation, et non la relation. Aussi peuvent-ils s’orienter vers l’usage de la coercition, de l’exploitation sexuelle et de la violence sous différentes formes…Les filles, elles, acceptent – à un âge où elles n’ont pas suffisamment de maturité et de sens critique – des pratiques sexuelles extrêmes qui ne leur plaisent pas forcément, d’où une sexualisation précoce s’accompagnant de conduites à risques qui peuvent les mettre en danger.

Société

L’hyper sexualisation renforce les rôles sexués, fondement de toutes les inégalités (hiérarchisation des rôles, précarité au travail, inégalités professionnelles et d’avancement dans la carrière…). On assiste donc au recul de l’égalité homme-femme. Les violences faites aux femmes augmentent. Les préoccupations scolaires passent au second plan pour l’un et l’autre sexe! Et, en particulier, les jeunes filles et les femmes ne peuvent que baisser leur niveau d’aspiration et leur ambition. Enfin, elles se désinvestissent de l’action collective d’intérêt général – politique, associative, féministe – ce qui nuit à la démocratie et au progrès social.

IL EXISTE DES MOYENS DE PRÉVENTION

Les leviers :

La prise de conscience est le début de la capacité à changer de regard et à lutter contre l’hyper sexualisation. Il faut ensuite agir dans un esprit de prévention aussi bien :

En tant que parent-e

– Développer la « confiance en soi » et l’« estime de soi » de nos enfants pour les rendre capables de résister aux pressions des pairs ou de la société. – Protéger l’identité des fillettes pour qu’elle ne soit pas basée uniquement sur le paraître, la soumission aux regards. Leur expliquer que chaque âge a ses (pré)occupations, ses plaisirs, ses devoirs… Leur dire aussi qu’on les aime comme elles sont… – Aider les garçons à sortir de leur image de prédateur – Éviter de « victimiser » les filles, comme si elles étaient toujours plus fragiles, moins résistantes que les garçons. – Favoriser chez elles plutôt la solidarité en les élevant sans esprit de compétitivité, de rivalité entre elles. – Etre attentif-ive aux changements de comportements : troubles alimentaires, focalisation sur l’image corporelle, obsession de la minceur… plus généralement, tous déplacements des intérêts intellectuels vers les projets reliés au corps. – Occuper « le temps de cerveau disponible des jeunes » de manière à « muscler » ce cerveau grâce à des pratiques sportives et culturelles saines. Et exiger que les pouvoirs publics assument leurs responsabilités pour rendre ces pratiques accessibles à tou-te-s (équipements, formation, transport…)

En tant que citoyen-ne

– S’organiser en groupes de pression (parents d’élèves, associations de quartiers, associations citoyennes) – Dénoncer publiquement les images dégradantes des femmes ou des hommes dans les émissions télévisées, les publicités, les chansons/clips, etc.). – Interpeller les élu-e-s sur les politiques publiques en direction de la jeunesse, lesquelles doivent au minimum :

  1. Développer la capacité d’analyse et d’esprit critique chez les jeunes en faisant entrer dans les apprentissages scolaires l’éducation aux médias et au décodage publicitaire.

  2. Poursuivre dans les écoles des programmes d’éducation à la santé, à la sexualité et à l’égalité filles/garçons (permettre aux jeunes de parler sexualité avec des professionnels ou en famille plutôt que d’aller chercher des réponses dans les films ou revues.)

  3. Aménager des temps de parole pour les jeunes (recueil des craintes, des préoccupations, des besoins). Les amener à discuter de sujets dits « tabous ».

En conclusion, il faut aider notre jeunesse à être des hommes et des femmes libres des diktats marchands, libéré-é-s des stéréotypes sexistes, acteurs et actrices d’une société démocratique avancée, d’égalité entre hommes et femmes.

…Ainsi, nous cesserons « d’être le jouet sombre au carnaval des autres » (Aimé Césaire).

Muriel Ameller et Huguette Bellemarre, membres de l’association féministe Culture Egalité